La biodiversité marine du Cameroun menacée par la pêche illégale et la faiblesse de la gouvernance
Une nouvelle analyse révèle une intensification des menaces qui pèsent sur les écosystèmes marins et côtiers du Cameroun, notamment dans les aires protégées comme le Parc national marin de Douala-Edéa. Le rapport pointe du doigt la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), la dégradation des mangroves et l’absence de gestion efficace comme principales causes du déclin alarmant de la biodiversité marine dans l’une des zones les plus riches d’Afrique centrale.
L’étude, conduite par ENVIREP Cameroon en collaboration avec le CWCS et plusieurs partenaires, dresse un constat préoccupant : plus de 1 200 tortues marines et près de 300 mammifères marins sont capturés chaque année, les navires de pêche industrielle , souvent étrangers, violant régulièrement la limite de trois milles marins réservée à la pêche artisanale.
Malgré l’adhésion du Cameroun à plusieurs conventions internationales sur la protection des océans, l’application des lois reste très faible. Aucun des trois parcs nationaux marins officiellement reconnus, Douala-Edéa, Ndongoré et Manyange na Elombo Campo, ne dispose à ce jour de plan de gestion, de système de suivi ou de stratégie de financement durable.
Créé en 2018, le Parc de Douala-Edéa s’étend sur plus de 262 000 hectares. Il abrite des mangroves, des mammifères marins, des oiseaux migrateurs et des zones de frai essentielles pour les poissons. Mais il subit une pression croissante liée à l’expansion agro-industrielle, à la pêche non réglementée et à l’exploitation du bois pour le fumage du poisson, estimée à 2 500 stères par jour en haute saison.
Les experts tirent la sonnette d’alarme : la biodiversité s’effondre, et les communautés de pêcheurs sont de plus en plus marginalisées.
« Nous assistons à l’effondrement silencieux d’un écosystème qui fait vivre des centaines de milliers de personnes », alerte Dr Jean Folack, consultant principal. « Sans réformes immédiates, la productivité et la biodiversité de nos océans vont disparaître. »
Le rapport recommande des mesures urgentes, notamment :
- L’élaboration et la mise en œuvre des plans de gestion des aires marines protégées
- La régulation des pratiques et des engins de pêche
- Le renforcement de la surveillance maritime
- L’implication active des communautés locales et le partage équitable des bénéfices
Des efforts sont en cours, y compris le zonage marin, l’élaboration de plans d’affaires et des lignes directrices pour la gestion des Autres mesures de conservation efficaces par zone (AMCEZ). Mais un engagement politique fort et des ressources financières accrues sont indispensables.
Sans actions concrètes et coordonnées, prévient le rapport, le patrimoine marin du Cameroun — et les moyens de subsistance qu’il soutient — risquent d’être perdus à jamais.
Documents:
Note_technique_sur_les_AMCEZ_au_Cameroun_01_05_25.pdf
DIRECTIVES_AMP_ZONES_PERIPHERIQUES_01Mai2025.pdf
Analyse_paysage_marin_AMP_AMCEZ.pdf